Bougie blanche allumée. Pour toi. Je t’ai perdu. Le noir de la nuit en plein jour. Rester éveillé. Poursuivre sa vie. Ouvrir les yeux. Essuyer ses larmes. Eloigner ce vide. Rempli de ton absence. Ta présence irremplaçable. Ta place dans ma vie. Ma vie entre parenthèse, ma vie sans toi…

Ma vie sans elle. Peu après. Ma “femme de ménage”. Celle sur qui je comptais. Son bureau, son regard. Ses mots, les miens pour me libérer de mes souffrances. Un lien basé sur mon intimité, mon moi profond. Partie, c’est aussi un peu de moi qui s’envole. Deuxième repère qui s’effondre. Tenir. Encore…

Tu as perdu ton père. Mon grand-père. Ton passé ressurgit. Ta haine. Un ouragan. Balayant tout. Ce courage que tu n’as jamais eu. Celui qui t’aurait permis de te battre pour ta vie. Tu l’as pour te venger, lâchement. Kidnappant ses cendres. Me privant ainsi de me recueillir auprès de lui. T’acharner sur elle, Détruire son image.  Oubliant que tu parles de ma mère. Je suis ce lien, entre passé et présent. Je suis ton unique interlocuteur. Celui qui a déjà trop subi vos histoires. Celui qui va encore prendre pour les autres. Au loin ta culpabilité, sans recul. Ta souffrance comme excuse, tu vas me détruire. Jusqu’à ne plus tenir. J’étais ton fils. Pour survivre, rompre. J’ai perdu mon père.

Avancer. Sans re(pères). En manque de vie. Avec trop de pertes. Des décès encore. Pour rappeler que vivre et mourir sont indissociables… Devoir vivre, accepter que l’autre parte. Se résigner à l’insupportable de la vie. Se sentir seul. Parce que l’autre déçoit toujours. Un mal pour un bien. Ma force c’est ce que je suis. Je t’ai confié une promesse. M’y tenir. Pour être fier de moi, te rendre fier de moi Papy…

Ta bougie blanche toujours allumée. Comme une veilleuse. Pour me rassurer. M’accompagner. Fermer les yeux. Et espérer m’endormir de bonheur…

 

11 novembre 2012,17:17

Il pleut. Depuis deux jours. L’herbe est mouillée. Sur la vitre coulent les gouttes. Chemin hasardeux, tortueux, douteux. Elles s’arrêtent, repartent, hésitent. Rencontrent une autre goutte, arrivent à l’extrémité de la fenêtre. Fin d’une vie. Triste vie éphémère.

Le vent s’engouffre dans la fenêtre que Clara vient d’ouvrir pour sortir. Elle a froid. Elle s’en moque. Elle allume une cigarette. Habituelle compagne de solitude. Première bouffée. Qui déjà s’éparpille, existence illusoire. La pluie s’intensifie. Sensation humide. L’eau ruisselle sur son visage. Pas de goût salé. Malgré cette multitude de gouttes, toujours seule. Encore. En réalité non. Pourtant sa solitude l’asphyxie, l’accable.

Envie d’hurler son malaise.Que tout le monde sache, entende. Mais la solitude ne s’entend pas. Alors elle reste là, silencieuse. Elle attend sa goutte d’eau. Triste vie interminable. La lassitude, la mélancolie elle n’en peut plus. Etats d’âmes omniprésents.

La peur des autres aussi. Le manque de confiance en elle. En eux. Certains l’ont démolie par un amour trop fort. Ou alors pas assez d’amour. D’autres l’ont reconstruites. Par leur présence, leur soutien, leur regard. Petit à petit. Pierre par pierre. telle une forteresse. Une forteresse de cartes qui malgré sa force extérieure s’écroule en larmes au moindre souffle.

Elle a froid. De plus en plus.

Seule à en mourir. Tous les jours un peu plus. Seule avec ses souvenirs. Gravés dans son coeur. Ancrés dans son corps. Et ce passé coulant dans ses veines. Envie de les trancher. Se vider de ce sang. Sale et impur.

Elle jette son mégot, rentre. La pluie tombe toujours. Vingt heures. Plus de force. Ses pas, un fardeau. Elle se couche. Dans ce lit, trop grand.

Toujours ce bruit. Celui des gouttes sur la fenêtre.

Clara se meurt, Clara s’endort. Comme d’habitude, seule.

31 janvier 2009,11:24